vendredi 3 décembre 2010

La Route de Cormac Mc Carthy

"La Route" est le récit d'une survivance : celle d'un père et de son petit garçon, sur une terre abandonnée de toute humanité, dans un monde apocalyptique. Du lieu, de l'époque, du nom de ces deux hommes, on ne sait rien. Cormac Mc Carthy ne situe jamais son roman. Anticipation ? C'est au lecteur d'en décider, de faire son propre cadre, de donner corps à ces deux êtres errants. Tout au long de ce roman, âpre, rugueux, dur, il n'est question, page après page, pour l'homme et son enfant, que de cheminer vers le Sud, là où il fait plus chaud, seule quête, improbable, seul but, improbable également.  

Il n'est question que de survivre et de marcher et marcher encore sur une route interminable au bitume fondu, asphyxiés par l'air pulvérulent de cendres, dans un pays désolé, brûlé, stérile, hostile. Avancer sur une route dangereuse d'où toute vie  humaine et animale a disparu, si ce n'est croiser, parfois, quelques hommes errants, derniers survivants, zombies informes et hostiles dont il faut se défendre, hommes affamés, hommes abrutis par la faim, le froid, la pluie, l'errance dans cet univers abandonné par les Dieux.

Le rythme du roman est lent comme la progression de l'homme et de son petit garçon, l'atmosphère, étouffante comme l'air fétide et irrespirable qu'ils respirent, enténebrée, chaotique. Les dialogues, courts, secs, économes de mots, déroulent au fil des pages ce lien indestructible, plus puissant que la mort qui rôde partout en ces terres stériles : l'amour filial. Survivre à l'horreur, survivre coûte que coûte et, pour l'homme, sauver son fils, le protéger de chaque danger, le porter plus loin, toujours plus loin, le pousser en avant et dépasser pour lui la peur, la fatigue, la faim, la souffrance afin que ne demeure, et jusqu'au dernier instant de vie, que le souvenir de cet amour là, l'amour d'un père pour son fils. C'est, au-delà des périls, l'ode à l'amour d'un père pour son enfant que chante chaque page de ce roman à la beauté brute.


Le roman de Cormac Mc Carthy a fait l'objet en 2009 d'une adaptation cinématographique de John Hillcoat, au titre éponyme, avec Viggo Mortensen dans le rôle du père et Kodi Smit-McPhee dans celui de son fils.

(A noter que l'édition présentée ci-dessus et que je possède vient de paraître aux éditions du Seuil (en édition limitée de fin d'année). Il se présente également sous le format poche classique, au Seuil également).



Pam Baileys

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire